LE PASSSEUR

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Professeur Bernard Herzog - Médecine et Thérapies du Futur Connaissances et recherches pour améliorer Votre Santé et Votre Vie


France 3

 

Entretien avec Bernard HERZOG

Propos recueillis par Sylviane MABIRE, journaliste France 3-

 

B.H. : « Dans la société occidentale des progrès colossaux ont été effectués sur le plan technologique, aussi beaucoup de médecins ou de chirurgiens fascinés par le "miroir aux alouettes" de la technique sont-ils devenus exclusivement des mécaniciens du corps.

Cette médecine ignore l'accès symbolique et sensible du sujet. Il y a longtemps que les prêtres, de moins en moins nombreux d'ailleurs, n'assurent plus la guérison spirituelle et ne font plus de miracles.

Les années 1970 ont vu le triomphe de la psychanalyse freudienne et de ses dérivés. Celle-ci, bien que réductionniste, a eu le mérite de faire redécouvrir l'inconscient et les pulsions du corps. Ce fut une étape indispensable. La pensée occidentale a rigoureusement séparé le corps de l'âme, selon les rites de l'anatomie où l'on a le goût du macabre. Le freudisme a laissé de côté la Transcendance. Jung, le grand penseur de cette fin de siècle, s'est efforcé de la réintroduire pour mieux convertir son père pasteur qui avait perdu la foi... Il y avait 9 pasteurs dans sa famille. Paradoxe, il nous parle peu du corps. La médecine psychosomatique a tenté de réunir le corps et le mental, mais a totalement éludé la dimension spirituelle de l'homme, comme toute notre société qui tente en vain de cacher la mort et la souffrance. »

L.M. : En France, un couple de thérapeutes, Bernard et Christine HERZOG ont mis au point une pratique qui s’apparente au chamanisme, une voie royale de la guérison, telle qu’elle est encore en usage dans les sociétés traditionnelles d’Asie Centrale, d’Indonésie ou du Pérou.

Quel a été leur cheminement ? Que peut attendre la médecine occidentale de cette synthèse entre plusieurs formes de connaissances ?

Professeur HERZOG, qu’est pour vous la maladie ? »

B.H. : « La maladie correspond au mal dit, à la malédiction, à la négativité, au chemin de l’ombre. Nul d’entre nous n’y échappe à un moment donné de son existence. Pour les chrétiens, les maladies sont en quelque sorte des flétrissures de l’âme. Elles se manifestent par des symptômes que la médecine occidentale prend en compte sans répondre au sens même de l’interrogation suggérée par maladie. Le microbe, le cancer, sont des ennemis d’origine exogène. Selon cette façon de penser, il faut donc les éliminer, les extraire… alors que c’est le corps tout entier qui exprime un malaise profond ! L’organe atteint symbolise souvent clairement pourquoi l’homme est atteint car il est trop souvent ennemi de lui-même. Nous sommes individuellement responsables de notre corps et de ses dysfonctionnements, comme nous sommes responsables collectivement des déséquilibres du monde.

En Orient, "a contrario", l’adversaire fut-il une maladie n’est pas réellement un ennemi car il offre une résistance qui nous oblige à accéder à une autre dimension de l’Etre. L’adversaire n’est pas le Malin (Diabolos celui qui dissocie), mais une opportunité pour le sujet de se ressaisir, de se corriger et de se réunifier. Autrefois, dans nos sociétés traditionnelles, prêtre, sorcier et médecin étaient proches les uns des autres. Aujourd’hui, il conviendrait de redonner au médecin sa dimension sacerdotale pour que les sociétés occidentales endiguent l’explosion des psychoses, agressions, viols, meurtres méfaits en tous genres. Nous essayons dans notre pratique de prendre en compte non seulement le corps et son langage mais de replacer l’être tout entier dans une spirale spirituelle. »

L.M. - Quel a été votre cheminement ? Quelle est votre méthode ? » 2

B.H. : « En fait, nous n'avons rien inventé mais nous avons redécouvert certaines voies utilisées par les anciens et nous les avons adaptées à notre époque en regard de la psychologie des profondeurs de Jung puis en nous efforçant d'effectuer une synthèse de l'histoire des religions afin d'accéder au schéma symbolique du corps humain, l'épure du grand Architecte. Les humanités et les Beaux Arts, puis de solides études scientifiques m'ont guidé vers la médecine, les sciences physiques et biologiques, la cancérologie. J'ai enseigné la radiologie au CHU de Nantes, puis les circonstances de la vie m'ont poussé à m'intéresser à la psychanalyse jungienne notamment auprès de Roland Cahen et de Pierre Solié. J'ai commencé à y apprendre l'écoute et le décryptage des symboles. La rencontre de Christine mon épouse fut déterminante pour ma vie. Elle devait beaucoup m'aider à développer mon intuition et créativité littéraire. Un hasard si l’on peut dire puisque celui-ci n’existe pas, nous fit redécouvrir Artémidore d’Ephèse et son traité après avoir rédigé six premiers livres (cinq sont édités à ce jour.).

Nous avons été mis en contact par le Dr. J. MABIT avec les curandéros péruviens puis nous avons découvert une douzaine de dukuns indonésiens en 1988. Ils me décrivirent comme ayant dans l'autre monde un grand nombre "d'yeux autour de la tête", ce que nous appelons la clairvoyance. Je me suis intéressé aux pratiques magiques opératoires de ces populations qualifiées de "primitives" bien à tort. En Occident, la pensée "magique" existe mais est beaucoup moins opérative du fait du matérialisme et de l'absence fréquente de vie intérieure. Je me suis intéressé aux guérisseurs bretons avec toute la rigueur de ma formation scientifique qui avait plutôt fait de moi un grand sceptique.

Notre méthode comporte deux volets :

1.

 

Le premier volet

: Notre matériau privilégié est l'imagerie mentale, le rêve raconté par le patient, interprété par lui et ensuite par nous-mêmes, mais ce n'est pas le seul, loin de là. Les rêves renseignent très précisément sur l'état de santé du patient, ses probabilités de guérison en cas de pathologie, sur son degré d’évolution spirituelle, son histoire réelle et non fantasmée, et ses conflits, même les plus refoulés, voire sur le futur.

Dans les rêves "tout est dit". Si le sujet parvient à extraire les racines profondes des conflits psychoaffectifs qui sont à l'origine de sa pathologie, la thérapie par les rêves peut être un adjuvant sérieux et fiable d'autres thérapeutiques médicales ou chirurgicales, parfois elle peut les remplacer dans les affections psychosomatiques avec succès.

Le graphisme, les dessins, l'attitude du sujet, son comportement, ses gestes, ses mimiques, sa voix, son regard tout possède un certain sens, nous donne de précieuses indications.

2.

 

Le deuxième volet

 

de notre activité thérapeutique est d'utiliser de la musique et des sons filtrés, notamment pour les enfants en difficulté d'adaptation. Ceux-ci permettent une régression et opèrent de façon semblable à une sophronisation.

Ils jouent le rôle d'activeur de l'activité onirique et de l'inconscient de façon générale. Nous ne les utilisons pas pour tout le monde car chaque être est unique et irremplaçable. II ne peut y avoir de thérapie industrialisée ! »

L.M. : « Qu'est-ce qu'un chaman ? Comment le devient-on ? »

B.H. : « Le chaman est un homme qui anime la vie magico-religieuse des communautés qualifiées de "primitives" de Sibérie, d'Amérique du Nord, d'Asie. C'est une figure dominante de la communauté, car il est à la fois prêtre, magicien, "médecine-man", bien que des fonctions existent au sein des tribus de façon spécifique, lui, a été désigné, car iI a, soit maîtrisé la technique de l'extase, soit le feu ou le vol magique, du moins il est capable d'entrer en communication avec les esprits de la nature ou les esprits des morts. 3

Pendant l'extase, l'âme du chaman à la différence des attitudes extatiques, est censée quitter le corps pour entreprendre des ascensions célestes ou des descentes infernales sans pour autant rompre toute attache avec lui. La vocation de chaman lui est indiquée soit par un ancien chaman qu'il est amené à remplacer, soit par ses propres rêves. II passe par de très longues épreuves initiatiques et très dures. II doit être capable de se concentrer, d'accepter son rôle, de suivre une ascèse, à des intensités que le profane ne peut atteindre. II ne doit être ni un homme d'argent ni de pouvoir, mais entièrement versé au service des autres, dans le sens de l'Amour universel.

Il semble selon les enseignements chrétiens que nous sommes tous guidés par un Esprit qui a accepté de nous accompagner durant notre incarnation, durant notre cheminement terrestre. C'est souvent une femme. Les Esprits sont les "corps énergies" retournés dans l'autre monde, ayant quitté leurs carcasses. La confusion avec le champ de conscience, ou l'Ego, est à éviter.

En Occident le terme de chamanisme est parfois employé mais nous préférons celui de "médecine-man" ou médecin prêtre.

On ne s'intitule pas médecin-prêtre sur seul décret de l'Ego ; ce n'est qu'après un long travail d'intériorité que l'on peut y parvenir. Mieux vaut être déjà médecin ou soignant. Mais cela n'est pas indispensable car les Esprits possèdent la Connaissance, ce qui réduit à peu de chose le Savoir Humain. Après la traversée des épreuves inévitables de l'existence, il est nécessaire d'avoir soi-même accès aux trois niveaux de développement de l'Etre et de sa destinée eschatologique. Nul ne peut prétendre aider à la réunification des "morceaux épars" de ses patients, s'il ne s'est pas lui-même édifié, restructuré après avoir quitté sa gangue matérialiste, réunifié. Trois étapes me semblent indispensables :

1. La santé du corps et de l'esprit (avec intégration et le dépassement des trois stades classiques, oral, anal, génital).

2. Le développement de l'étage psychoaffectif grâce à la rencontre de l'autre, dans un respect mutuel qui préside à l'édification d'un foyer harmonieux où règne la joie de vivre à travers un amour réciproque débarassé des humeurs et résidus pulsionnels.

3. Par l'intégration de la dimension spirituelle, c'est à dire "être en marche vers la lumière".

C’est seulement à ce niveau de développement que l’on peut avoir réellement accès à la profondeur des symboles et des mythes. Autant dire que très peu de thérapeutes y parviennent, plus préoccupés d’intellectualisme et de savoir livresque que de chemin d’intériorité.

Le chaman accède à la restructuration des images inconscientes, seule opératives pour donner une chance de survie où de guérison. Nos propres rêves sont aussi riches d'enseignements, de suggestions. Les dons de clairvoyance, et certains états d'expansion de conscience bien contrôlés permettent de donner accès à d'autres réalités. »

L.M. : « Le chaman a-t-il à voir avec la possession ? »

B.H. : « Vus de l'extérieur, certains des états d'expansion de conscience, surtout pour les occidentaux, peuvent être interprétés par leur entendement matérialiste comme des formes épileptiques ou hystériques, ou de psychopathologie, ce dont ne se privent pas certains "psy" imperméables à toute dimension humaine authentique hors celles du "pathos"... et inconscients de leurs problématiques mentales majeures car dénués de toute autocritique et de toute intelligence du coeur.

Le chaman a en principe une sensibilité particulière du système nerveux qui n'a rien à voir avec la fragilité, mais qui lui permet d'être réceptif aux messages. Quand à nous, nous pouvons dire que notre cheminement est plus parsemé d'épines que de roses, ne serait-ce que 4

de s'affronter au conservatisme de cetains collègues à l'intégrisme destructeur, ce qui n'est pas une mince affaire !

On ne peut plus introduire de liquide dans une bouteille quand elle est déjà pleine... cela déborde sans y pénétrer.

En d'autres termes le possédé qui se pense être tout à fait normal et "bien pensant" est susceptible d’être l'instrument des "Esprits" de l'Ombre, alors que le médecine-man en a la maîtrise. »

L.M. : « Quelle distinction faîtes-vous entre l'Esprit et les esprits ? Que pensez-vous de l'obtention d'états modifiés de conscience sous drogue ? Cela peut-il se faire en Occident? »

B.H. : « Dans les civilisations sud américaines on utilise le peyotl, la mescaline et d'autres hallucinogènes, l'ayauesca. Les prises des drogues sont ritualisées et signifiantes pour la communauté. C'est un rituel religieux codifié, donc contrôlé et accompagné, à des dates particulières. Mais cette voie n'est pas exclusive, d'autres techniques permettent de parvenir à des effets similaires. La voie qui utilise la drogue est la "voie humide" par opposition à la voie sèche celle de la prise de conscience, de la solarisation par un travail d'intériorité. La voie humide est passive et brutale, alors que la voie sèche est active et suppose la durée. L'initiation, un apprentissage progressif de l’intégration de la mort, s'effectue toujours par paliers successifs. Les drogues ne favorisent pas toujours l’épanouissement et provoquent souvent la dépendance, ce qui n'a rien à voir avec la liberté de l'Etre. Pour pouvoir agir avec un certain niveau de conscience l'esprit doit rester clair et assurer de toutes ses potentialités naturelles, rester critique notamment ce qui inclut la raison et le respect de soi-même de son corps et d'autrui.

Vous voyez les conséquences néfastes que l'usage de la drogue peut avoir dans nos sociétés occidentales. Ces moyens artificiels éloignent encore plus de l'inconscient créateur ; ils signent le ratage de la vie de l'esprit. La véritable voie initiatique n'est pas sans écueils et sans dangers, on ne l’aborde ni seul, ni n'importe comment... et ce n'est pas un boulevard où tout le monde peut s'engouffrer, comme une école obligatoire avec ses programmes rationalisés. »

L.M. : « La voie initiatique passe-t-elle par le détachement ? »

B.H. : « Je pense absolument le contraire, le refuge dans la vie d'ermite constitue un refus d'échanges avec les autres. Le détachement des mirages de la MAYA et des singeries du monde, de l'hypocrisie OUI, mais en aucun cas l'absence d'échanges avec autrui.

En Orient cela semble évident, pour nous en Occident l'ermitage et le refus des biens de ce monde est si rare que même les gens d'églises ont succombé au faste et au luxe à certaines époques. En ce qui me concerne je préfère une intégration juste et raisonnée à la société, un équilibre harmonieux. Notre mission terrestre passe par une action positive dans la communauté, par l'exemple et le sourire non par la guerre.

On peut vivre décemment tout en poursuivant le chemin vers la Lumière. Par contre faire fortune est suspect, c'est un bon moyen de distinguer les faux gourous ....»

L.M. « La pratique que vous avez est-elle généralisable ? Que dire à quelqu'un qui cherche ? »

B.H. : « Toutes les personnes venues nous demander de l'aide ou des conseils en ont retiré profit, sans avoir à vivre des états dépressifs, des régressions interminables, ni les suicides des cures psychanalytiques classiques (ceux des premiers élèves de Freud notamment...).

 

Le travail d'intériorité est joyeux, même s'il comporte des périodes difficiles, des prises de conscience douloureuses pour ceux qui n'ont pas voulu quitter leurs infantilismes -ou leur penchant invétéré pour la négativité.

En général les entretiens sont joyeux. Le vécu est un émerveillement permanent devant la richesse de l'inconscient. On vit son rêve car la vie n'est qu'un gigantesque rêve. Tout prend sens. On joue sa vie et son devenir dans la joie d'avoir enfin accès aux rêves d'enfance les plus osés. La vie reprend ses couleurs, l'amour ses secrets merveilleux et son jardin intérieur s'enrichit de parfums subtils. Les contes de fées deviennent parfois la réalité.

Cette pratique est généralisable car elle constitue la voie royale du destin de chacun. Celui qui cherche, entre en travail peut espérer dès lors voir son destin se modifier, il tisse lui-même sa nouvelle destinée où il se rend selon les indications de son coeur, car le coeur ne se trompe jamais. Il est le seul guide en cette vie capable de nous permettre de retrouver notre véritable direction et nous mener sur le chemin de l'Amour, de la Lumière et de la Connaissance. »

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