L'homme a sacralisé de tout temps, et à toute époque, les forces qu'il ne pouvait ontrôler et auxquelles il se soumettait sous la violence et la nécessité des contraintes de la vie.
II est vrai que, grâce au développement scientifique, nous avons la chance de connaître quelques approfondissements dans les fonctionnements de la vie, donc de démythifier apparemment tous les sujets qu'on avait érigés et divinisés auparavant.
Cela appelle une remarque : plus l'on s'enfonce dans le chemin du reniement du sacré plus on élève la science sur l'autel de la divinité. Ainsi se reproduisent les erreurs de nos prédécesseurs et on finit par oublier les fonctions même de la vie.
C'est ainsi que notre civilisation a induit progressivement, sans s'en rendre compte, une efflorescence de sectes et de toxicomanies sans savoir combattre les conséquences qui en résultent.
Chaque civilisation génère ses miasmes et ses maladies au cours des millénaires, ce nouveau fléau est aussi destructeur de l'individu que de la civilisation elle-même.
En reniant la notion de respect, c'est-à-dire en reniant la notion de "la paix de la chose; qui consiste à laisser les choses en l'état - non pas inamovible bien sûr - mais dans celui de l'évolution normale sans vouloir délibérément créer un évènement forcé, forcené car né de la force excluant la liberté de choix de l'individu.
Une évolution positive est possible à la condition que l'ensemble du monde scientifique soit - non plus pris par le tourbillon de la richesse pécuniaire - mais capable d'évoluer dans la richesse de la connaissance des réalités spécifiquement humaines.
II est vrai que les églises, sous la forme de quelque inquisition que ce soit, ont procédé à des tueries, aux massacres de peuples plus faibles, d'individus plus fragiles ou mal pensants, ou pensant mal, pour imposer leurs dogmes.
Ces graines de haine sont sans cesse semées à tous les vents par les faiseurs de vents et de doctrines, et ces semences génèrent des volcans d'où jaillit la douleur, la souffrance. Elles font fuir toute une fraction vers des cimes plus ou moins éphémères, plus ou moins crédibles, plus ou moins réconfortantes mais aussi plus ou moins destructrices par manque de discrimination car c'est là où le bât blesse.
C'est ainsi que se développe le reniement du sacré car notre capacité de discrimination est très atténuée par une pensée qui relativise tout et n’a absolument aucune mesure des conséquences funestes qu'elle génère elle-même !
Cette pensée édicte et ne dicte que des lois, ou des règles, énonce et impose des vérités qui ne durent que l'espace d'un temps c'est-à-dire moins de temps que la vie d'une rose mais qui ont toutes des conséquences néfastes qu'on refuse d'envisager.
C'est donc la source de différents maux qui sont nos propres cancers, notre propre lèpre, que nous édictons à chaque instant. Tous les terribles fléaux que nous subissons et que nous subirons à l'avenir ne sont que la résultante du manque de discrimination. II est lui-même le 2
fruit d'une carence ou d'une obstination persistante à renier le domaine du sacré, donc de la Vie elle-même !
L'essor de la technologie et des sciences appliquées a complètement bouleversé la civilisation occidentale avant de détrôner les Dieux orientaux par exemple, au Japon, et en Indonésie, où s'affrontent les générations anciennes fidèles à la tradition et l'invasion matérialiste, une déferlante générée par la puissance économique américaine ou européenne qui a bouleversé le continent africain, déstabilisé l'Europe et l'Amérique.
La confusion entre la spiritualité authentique et l'utilisation de la religion à des fins de pouvoirs politiques n'est jamais assez dévoilée. RENAN, qui a été mal compris et mal utilisé, avait déjà indiqué cette voie étroite.
"S'éloigner de Dieu pour se rapprocher du divin... conduit à la réhabilitation déterminée et militante d'un humanisme qui respecte le divin sans sacrifier aux Dieux".
Le nihilisme scientifique et le sectarisme scientiste renient toute religion, mais aussi l'individu lui-même car l'intolérance de la pensée résulte de sa propre tendance à se sacraliser elle-même.
L'homme contemporain veut ignorer "l'au-delà" et nous assure qu'après la mort, il n'y a que le néant ; ainsi se vit-il comme néant.
Associer l'au-delà au néant conduit à se vivre comme néant.
C'est pourquoi on s'anéantit ou on utilise au besoin la technologie pour randomiser et organiser la néantisation des autres. Hitler l'a démontré, il n'aurait pu y parvenir sans la complicité d'une myriade de sujets éduqués dans la négation forcenée d'eux-mêmes, comme Alice MILLER l'a montré. Ce comportement retrouve la logique des clans toujours existants en Afrique, à Irian Jaya ou même en Europe : le génocide naît du reniement, car l'homme se ment ainsi à lui-même et à ses racines.
Depuis un siècle, le progrès technologique scientifique voudrait occulter la spiritualité et cette attitude résulte également des errements de certains religieux. Aussi tout le monde de l'intériorité, de la poésie, de la mythologie et des croyances est progressivement rejeté. En conséquence, les fondements de l'humanisme, du respect d'autrui et de la qualité des échanges entre les hommes régressent sans cesse, pétrifiant les émotions, les pulsions et l'assise même de la civilisation, réduisant l'homme à l'animalité stricte. Ce nihilisme est à la solde de l'impérialisme des hommes d'argent qui en tirent profit.
Le reniement du sacré amène l'explosion de recherches sauvages, masquant mal les appétits de pouvoir des sectes, du sectarisme.
Renier c'est nier Rê ou. Râ, c'est-à-dire le principe solaire des Egyptiens.
Renier c'est aussi "nier le rêne", donc la discrimination, le fil d'Ariane qui nous permet une issue hors de la Caverne fondamentale décrite par PLATON, ce qui est le propre cheminement de l'homme, l'entraînant ainsi dans la confusion entre l'Ombre et la Lumière. Ce comportement nihiliste consiste à désacraliser sans cesse les choses de la Vie et de l'humain afin de prendre une manière de devenir personnel.
- Cette attitude consiste à se sacraliser soi-même mais aussi ses pensées ses pulsions comme ses caprices et confondre la liberté du choix avec un libéralisme effréné qui conduit au "n'importe quoi", élimine tous les repères et induit une ombre collective propice aux excès en tous genres.
Cela permet d'édifier les cultes aberrants, déviants, les folies les plus extravagantes.
Le propre de l'être humain est d'effectuer une discrimination car il a la liberté du choix.
Le reniement sacré induit à notre époque la perte des valeurs humaines et du sens de la vie, entraîne une lourde pesanteur masquant mal une panique générale qui déstabilise non seulement le système familial, mais tourne en ridicule les valeurs fondamentales du couple, de l'amour. 3
On élimine tous ceux qui ne sont pas conformes ou qui pensent différemment. Dans bien des couches de la population que l'on prend à tort pour évoluées parce qu'elles gagnent simplement plus d'argent, on retrouve ces comportements hypocrites, et masqués derrière les rites et les coteries, les sociétés secrètes, les chapelles et les messes basses c'est la trame même de la vie au village, à l'Université, dans les administrations, partout où la quête du pouvoir et de l'argent, constitue le dénominateur commun. Ainsi la perturbation a-t-elle sapé l'équilibre social, bouleversé des états entiers.
Le genre humain angoissé est sujet à la crainte de voir le ciel lui tomber sur la tête. Cela engendre :
- la fuite dans un réglisme fanatique et sectaire qui amène une annihilation ou une déstructuration des sujets. II les empêche de se développer, les laisse dans une position d'infantilisme majeur et conditionne une démission du Moi, lequel peut conduire aux pires excès.
- une recherche en tous sens et de tous côtés sans discrimination,
- une recherche spirituelle manipulable, voire suicidaire ou sectaire, mais aussi un refus du passé et des siens que compensent ambivalence oblige - des retrouvailles factices dans un cocon artificiel tissé d'un mysticisme de pacotille. Certains versent dans le culte irraisonné d'un quelconque gourou nimbé des effluves d'une apparente luxure torve qui leur procure une illusion de bien-être avec, comme intermédiaire, un rituel pseudo initiatique ou des compléments hallucinogènes conduisant au besoin de "prendre son pied" dans les herbes ou les fantasmes ego- imaginatifs ou égocentriques, aussi destructeurs qu'un bataillon armé de kalachnikovs ou de naufrageurs pilleurs d'épaves.
Le reniement sacré engendre au travers d'un travestissement de la notion de Foi; l'incroyable faiblesse des hommes et l'immoralité des responsables manipulés par les puissances économiques, nous laissant tous à la merci d'une nouvelle épidémie destructrice des conquêtes civilisatrices acquises par le labeur de toutes les générations qui nous ont précédés.
Tous ceux qui s'élèvent contre le sacré génèrent ces problèmes. II ne s'agit pas de mettre des tabous partout si on ne démontre pas le Pourquoi !
Pour moi, réussir sa vie, c'est réussir son chemin : vivre dans la Joie et cette Foi que procure la joie de vivre dans le respect des uns et des autres.
Bernard HERZOG
1 er congrès mondial de psychanalyse - Vienne