“Le culte inconscient de la négativité”
EVA
Eva, mère de famille est une jeune femme à la fois belle et intelligente mais frigide. Après dix ans de vie commune son mari l’irrite avec ses fantasmes, nés de la lecture de “Lui” ou de “Playboy”, revues où l’anatomie intime des femmes avoisine parfois avec une sexualité sophistiquée de bordel Thaïlandais.
Ecoutons une série de rêves évoqués au cours d’une séance de travail.
Rêve du 21.02.1993
« Nous sommes dans un pays nordique. C’est la nuit. Nous frappons à la porte d’une auberge, une femme nous accueille. Elle ressemble à ma mère aux cheveux courts. Elle tient dans la main droite une sorte de petit balai à clochette et l’agite devant elle. Elle nous conduit à notre chambre. Il y fait un froid glacial : la fenêtre est restée ouverte. La femme se met alors à défaire les lits. Ceux-ci n’ont pas été faits, les couettes et les draps sont tout humides. Elle nous dit qu’ils ont été nettoyés à l’eau de javel.
Parmi nous se trouve une fille assez grande et forte. Elle sort de la chambre et part visiter la maison. Mon mari la suit, puis les autres. Je suis la dernière à quitter la chambre. Je descends au sous-sol où se trouve une salle de gymnastique. A travers une baie vitrée je vois mon mari faire l’amour avec elle. Ils sont au bas des escaliers. A côté d’eux, un autre couple est aussi accouplé…. »
« L’auberge est en général un endroit accueillant. Ici, le décor est chaleureux, mais c’est une apparence, car l’atmosphère est glaciale. Je pense à mon enfance, confortable mais dénuée d’amour. Je pense aussi à mon corps qui a du mal à se libérer. Je ne suis que spectatrice et non actrice dans mon rêve, c’est à peu près la même chose dans la réalité. Ma mère d’apparence chaleureuse et conviviale a tout fait contre l’amour.»
Rêve du 22.02.1993
« Je suis avec mes enfants au bord de la mer, dans un port. Je vais visiter une grande maison toute blanche. J’entre au contraire dans une maison aux volets clos. Je monte à l’étage, persuadée d’y trouver une femme morte étranglée, assassinée par son mari. Je pénètre dans toutes les chambres, il n’y a personne. Je redescends, la rue a changé d’aspect. Elle est sinueuse, caillouteuse et en pente. J’ai du mal à faire avancer la poussette. Mon mari arrive alors à ma rencontre et me dit qu’il n’aime pas me voir venir dans ce quartier. »
« La maison est blanche, ou noire, voilà la dualité, les deux aspects de moi-même. J’ai l’impression d’être à la recherche de ma partie féminine, intuitive, étouffée par une vision exclusivement rationaliste et matérialiste qui rend le chemin difficile à parcourir. On ne vit plus qu’en échafaudant des plans, on se perd en conjectures et non plus, en acceptant la vie comme elle est, en adoptant simplement une attitude d’ouverture. Il n’y a que des chambres dans la maison noire : l’affectif, le sentiment prennent une place trop importante dans ma vie. »
Rêve du 26 novembre1993
« De la fenêtre je vois le chat chasser les oiseaux au bord de l’eau, je le laisse à ses occupations. » « Je me promène dans le jardin parmi les arbres fruitiers, j’aperçois sur les feuilles d’un pommier une grande mante religieuse qui s’affaire. Quand elle relève la tête, je vois qu’elle a une tête de criquet. Je la laisse à ses occupations.
Puis arrive un gros lézard gris très en colère qui me charge. Je le prends en le tenant fermement car il bat de la queue et ouvre la gueule. Je sais qu’il n’est pas agressif. Effectivement il se calme et se blottit dans mes bras comme un chat. »
« Je retrouve le lézard que j’avais tué sans le voir dans un rêve précédent, je n’en ai plus peur, j’accueille mon instinctualité. »
La restauration de la créativité (l’art) est un culte à RA, le soleil qui donne la vie végétale, animale, humaine.Elle est liée à la sexualité.
Rêve du 27 novembre 1993
« Je suis dans une voiture conduite par un homme, assise à côté de lui. Il m’emmène visiter la campagne, le pays où il vit. Nous quittons la route et empruntons une voie plus étroite en dehors de l’itinéraire normal. Nous passons sous une très grande arche, immédiatement nous sommes à la verticale. La route devient une rivière couleur d’argent.
Nous montons, c’est très difficile car une force opposée s’efforce de nous faire descendre. J’ai peur de tomber à la renverse, l’homme me rassure gaiement. L’horizon ne m’est pas saisissable, car c’est une immense vapeur lumineuse, la rivière se confondant avec l’air. J’ai oublié de dire qu’à ce moment il faisait nuit tout autour de nous. »
« L’homme m’emmène dans son véhicule pour me montrer l’évolution, l’arche d’alliance qui relie la droite et la gauche, est belle et bien construite. Elle repose sur la terre puis la route, après avoir été sinueuse, devient verticale et lumineuse.»
Les rêves suivants l’incitent à quitter le collectif, et à rejeter la négativité de l’éducation parentale désormais dépassée et l’encouragent à accepter la peinture, c’est-à-dire l’alchimie. L’inconscient la régénère progressivement comme s’il s’agissait du début d’un monde nouveau dans l’apothéose du mystère.
Rêve du 29 novembre
« On refait l’histoire du début du monde, ce que je présente est accepté. On le compare à l’original et c’est la même forme, le même moule initial.»
« Le moule initial c’est Eve, mon identité est d’être femme. »
Rêve du 30 novembre
« C’est un endroit où l’on se rassemble pour parler comme autrefois dans les villages. Un peintre très âgé a un peu bu, il est très connu et a une très grande réputation. Il dessine sur le mur la maison avec son toit en triangle et sa cheminée et le tout est rempli de fleurs multicolores. Puis, sur cette peinture simple il se met à souffler et il projette des signes avec son souffle. Par projection cela s’inscrit à travers des moules, des grilles de lettres. À la fin cela ressemble aux peintures d’une grotte. Le peintre meurt alors. Les marchands sont venus et sont là devant le mur, et cherchent comment s’emparer de lui. »
« Le peintre vous ressemble, il m’initie à la peinture secrète, celle de l’âme. Les marchands spécialistes sont les banquiers de l’art qui s’emparent des œuvres des peintres. Ils détruisent le souffle divin de la création et réduisent en bouillie les œuvres qu’ils jettent dans l’arène à un public assoiffé, mais non discriminant, leur seul but étant l’argent.»
Aucune illusion, à avoir sur la dénaturation des œuvres d’Art. Notre société abonde en fausses valeurs, faux savoir et fausse Connaissance. Les banquiers ont mis au pinacle des artistes psychotiques et la pathologie mentale est désormais donnée comme un idéal, montrée en exemple aux jeunes générations sans repère; le processus de décadence a atteint un sommet. Les commerçants mènent le destin de l’humanité qui semble toujours se complaire dans la religion du Veau d’or : tel est le culte secret de la négativité qui est le fait d’Eva mais aussi de chacun d’entre nous à des degrés divers.
Rêve du 1er décembre 1993
« Je viens vous voir : c’est un port, il y a de hautes grues parmi les bâtiments modernes. Dans la pièce calme il y a des personnes paisibles que vous recevez pour parler, mais les gens se taisent. Je vois beaucoup d’œufs colorés. Le jeu consiste à les faire choisir par les autres. Chacun doit reconnaître celui qui lui est destiné, c’est un jeu que je connais. Alors je ne prends pas l’œuf que votre femme a pris car il est pour elle. On dit qu’elle peut aller le remettre près de la lampe chauffante dans la cabine transparente dont la couleur ressemble à celle de l’œuf. Il y a beaucoup de cabines. Je suis venue avec des rêves à étudier, vous êtes un peu endormi, je dis alors devant tous en m’excusant qu’il est important que je vois le professeur, car nous devons travailler.
Nous sortons de la pièce, traversons le hall moderne où les ouvriers travaillent aux cabines téléphoniques. De la gauche nous allons à droite, entrons dans votre bureau, mais là c’est plein de gens jeunes très brillants. Il n’y a pas moyen de s’entendre et je n’ai pas envie de parler de mes rêves devant tout le monde. L’heure est avancée, je pense que je n’aurais pas le temps de tout dire. »
Les œufs colorés sont autant de développements potentiels que le thérapeute doit aider à éclore puis à se développer. Il est un lieu de partance (le port) et de créativité. Pour cela des purifications successives sont nécessaires, une nouvelle école alchimique (peintures) à fréquenter.
Rêve n° 2
« J’arrive d’en haut en escaladant, enfin je saute sur une machine à laver qui fait la lessive. Je descends dans l’école, c’est une académie de Beaux-Arts. Les étudiants repeignent tout en coloris pêche rosé assez clair. C’est vaste. Les sculptures anciennes représentent des Dieux animaux, dont les yeux importants sont bombés et patinés par le temps. Elles sont en bois très foncé et incluses en partie dans le mur, elles nous regardent. Des portes ouvrent sur un jardin sous les tonnelles et les arbres. Tout est très ancien. »
« Le port est un lieu de partance, les grues sont aussi des oiseaux migrateurs, on dit aussi “faire le pied de grue”, ce qui indique une certaine impatience au départ. L’œuf est choisi, il faut le remettre à chauffer pour l’éclosion auprès de la lampe verticale dans la petite chambre claire, la cabine transparente. On répare la communication (cabine, petite chambre du bateau.)
Mon ancienne peau se lave dans la machine. C’est l’arrivée dans l’école, l’Académie, le jardin d’Akadémos où Platon enseignait. C’est là un lieu d’enseignement de l’âme ! C’est aussi en rapport avec la notion d’immortalité, ce qui survit sans fin dans la mémoire des hommes. Les Dieux sont représentés à gauche, inclus dans le mur, c’est-à-dire dans la fondation de l’édifice. Sur des dessins je bourgeonne à gauche et la droite s’illumine.»
Le chemin antique de la recherche intérieure rejoint les démarches spirituelles de toute époque de l’humanité. L’inconscient signale à Eva ses richesses potentielles et le sens évolutif : la gauche (sinister) représente le passé, le retour régressif inconscient qu’elle doit quitter pour aller à droite (coté du père, de l’avenir positif) ou la lumière la guidera car chacun de nous se doit de choisir la positivité, la lumière et non l’ombre, la négativité. La quête de la lumière nécessite des efforts, le feu des forts…